Fête du travail, le 1er mai est traditionnellement un jour férié dans de nombreux de pays. Chaque année, il est de coutume de s’offrir un brin muguet, symbole du triomphe du printemps sur l’hiver. Une herbacée caractérisées par ses nombreuses grappes de clochettes dont l’histoire est teintée de multiples facettes que la Revue Dynastie vous propose de redécouvrir.
Tout commence par des mythes. Le muguet est une plante qui fut, dans des temps reculés, appréciée des Dieux de l’Olympe. Il est dit que le dieu Apollon aurait créé cette fleur afin d’en tapisser le sol et le parfumer de son essence pour permettre à ses neufs nymphes aux pieds nus de marcher dessus sans se blesser. Une autre légende affirme que Saint Léonard, un ermite, dut se battre contre un dragon qu’il terrassa et que les gouttes de sang qu’il perdit au cours du combat donnèrent naissance à des pieds de muguet. Une herbacée célébrée même par les celtes qui associèrent sa floraison à l’abondance offerte par la nature.
Une fleur de la Renaissance
Ce n’est qu’à la Renaissance que le muguet va prendre soudainement une importance inattendue. C’est à la reine Catherine de Médicis que l’on doit réellement la tradition et l’introduction de cette herbacée printanière, qui se caractérise par de petites grappes de clochettes au parfum des plus odorants, dans nos maisonnées de France et de Navarre. Lorsque les guerres de Religion éclatent, elle part en Provence en 1561 (ou 1564 tant les historiens sont divisés sur le sujet) afin de contraindre catholiques et protestants à signer un traité de paix. Sur le chemin, elle fait une halte dans la ville de Tricastin, accueillie par le chevalier Louis de Girard de Maisonforte, baron local et espion à son service. C’est des mains de ce noble drômois que la veuve d’Henri II, arraché à la vie trop tôt suite à un mauvais tournoi, reçu alors un petit bouquet de muguet fraîchement cueilli de son propre jardin. Ramené au château de Fontainebleau dans de bonnes conditions, certains diront par l’opération du Saint-Esprit ou de la Vierge inspirée ce jour-là (une légende affirme que « ce sont les larmes versées par la Vierge Marie au pied de la croix qui seraient à l’origine de sa naissance » ), le bouquet fut remis au jeune Charles IX qui en fit venir rapidement des caisses entières de Nantes afin de les distribuer aux jupons richement brodés de la cour de France. le 1er mai suivant Tout à son romantisme prépubère, le roi déclara sobrement « Qu’il en soit fait ainsi chaque année ». La coutume de naître à travers les yeux malicieux du second des derniers rois Valois.
Vichy institutionnalise la fête du Travail et le muguet
Avec la Révolution française, le muguet devient l’objet d’un vaste débat et d’un enjeu commercial. C’est à Claude-François de Payan, un ami de Robespierre, que l’on doit la vente de la fleur dans la rue et que le calendrier révolutionnaire de Fabre d’Eglantine fixa au 3e jour des sansculottides de 1793, soit le 26 avril, afin de rompre avec la tradition royale. Trop monarchique pour certains, on cessa de s’offrir du muguet et ce n’est qu’au XIXème siècle que la fleur retrouvera une certaine aura chez ces messieurs qui en portent un brin sur le veston de leur redingote, Notamment les soirs de première à l’opéra. C’est d’ailleurs en 1867 que Napoléon III décide de faire du 1er mai, une fête du Travail. Avec la Belle Époque, les grandes maisons françaises de couture offrent à leurs petites mains un brin de muguet, futur emblème de la Maison Dior. Il faudra attendre le 24 avril 1941 pour qu’un certain maréchal Pétain institutionnalise ce bouquet de fleurs en décrétant la fête du Travail , un jour « férié, chômé et payé ». Bien que la raison officielle fût pourtant des plus politiques. Le but avoué du régime de Vichy était de remplacer la fleur rouge d’églantine (adoptée après la répression du 1er mai 1891 à Fourmies et en hommage au révolutionnaire du même nom), que Philippe Pétain voyait comme un signe de ralliement aux partis de gauche et de contestation sociale, par la douceur offerte par le blanc muguet jugé plus consensuel et capable d’attirer le ralliement des ouvriers à son régime.
Une fête du Travail jamais abrogée, pourtant un héritage de Vichy, aujourd’hui devenu le synonyme de revendications et manifestations syndicales. Une revanche sur l’Histoire mais aussi une journée royale s’il en est et que l’on commémorait déjà sous la Rome antique qui attribuait au Convallaria majalis, les plus belles vertus de bonheur.
Frederic de Natal