Descendant du roi Charles X, Maître Jean-Philippe Carpentier allie héritage historique et engagement contemporain. Consul honoraire du Grand-Duché de Luxembourg pour la Normandie et président du Corps consulaire depuis 2024, il s’illustre aussi dans le monde académique et juridique. Enseignant et auteur, cet avocat de formation incarne une figure à la croisée de la tradition et de la modernité.
Sous l'égide de Tatiana Rodica Dumas, #consul honoraire de #Slovénie en France, à l'invitation de Samo Turel, maire de Nova Gorica, j'ai eu la chance de me rendre dans la #capitale #européenne de la #culture.
— Jean-Philippe Carpentier (@JPCarpentierUE) August 22, 2025
Guidé par Evelin Bizjak, la journée a commencé en #Italie à #Gorizia… pic.twitter.com/l2onTQB1XJ
Revue Dynastie : Vous avez expliqué dans la presse avoir découvert votre filiation avec Charles X par hasard. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette généalogie qui vous relie avec le dernier roi sacré des Bourbons ?
Jean-Philippe Carpentier : Tout a débuté par une recherche sur la maladie d’Alzheimer conduite par un ensemble de scientifiques regroupés dans le READ (Researchers Enhancing Alzheimer’s Diagnostic). Il s’agit d’une équipe multidisciplinaire internationale qui travaille au développement et à l’amélioration du diagnostic de la maladie d’Alzheimer et des maladies neuroévolutives apparentées.
La READ a fait plusieurs publications scientifiques.
Dans le cadre d’une consultation, j’ai remis mes résultats de test ADN au coordonnateur de cette équipe, qui en a fait une analyse, confirmant ma filiation agnatique, c’est-à-dire par les mâles, avec les Bourbons.
Les conclusions de cette recherche ont été :
Que j’étais issu « de la fratrie Louis XVI, Louis XVIII et Charles X », sans que les scientifiques puissent déterminer l’identité de la mère de mon ancêtre ; Que le professeur d’histoire, Alan James, du King’s College de Londres, a tranché en faveur de Charles X.
Cette recherche scientifique a ainsi confirmé que je descendais de la branche ainée des rois Bourbons, par Charles X.
RD : Comment avez-vous accueilli cette révélation familiale, et en quoi a-t-elle changé votre regard sur votre propre histoire ?
JPC : Il existait, dans ma famille, une connaissance de cette filiation à laquelle je n’avais, finalement à tort, pas prêté l’attention que cette tradition orale méritait.
La confirmation scientifique de cette filiation a modifié mon regard sur Charles X et ses prédécesseurs, renforçant l’approche familiale de l’Histoire que j’avais déjà. En effet, la plupart de mes arrière-grands-parents descendent de Saint Louis et j’avais déjà cette vision familiale d’une histoire qui, sur le fond m’a toujours passionné.
Mais surtout, cette confirmation a été l’occasion de nouvelles recherches et découvertes, comme la proclamation de mon ancêtre André Nicolas Thomas [issu d’une relation entre Charles X et son ancêtre, Anne-Barbe Pouyer-ndlr], le fils de Charles X, comme sous-lieutenant de la compagnie de la Garde Nationale.
RD : Le 19 août dernier, vous vous êtes recueilli devant le tombeau de Charles X à Kostanjevica. Quelles ont été vos émotions à ce moment précis, et que représente pour vous ce lieu singulier de l’histoire monarchique française ?
JPC : C’est avec une émotion toute particulière et intense que je me suis recueilli sur la tombe de Charles X.
Comme je l’ai déclaré spontanément sur place, « j’ai été submergé par de fortes émotions. Tout cela semble si loin et pourtant si proche. J’étais extrêmement heureux de pouvoir me recueillir un instant seul devant sa tombe. ». Il faut cependant replacer ma présence à Kostanjevika dans son contexte, plus large d’une visite en Slovénie organisée par Tatiana Rodica Dumas, consul honoraire slovène en France, au cours de laquelle les invitations se sont succédé.
Le 19 août 2025, j’ai été officiellement reçu par le Maire de Nova Gorica, Samo Turel, qui avait prévu un programme me conduisant le matin en Italie, à Gorizia, au Palais Coronini Kronberg, dans la chambre où Charles X était décédé puis à la Cathédrale de Gorizia où la cérémonie religieuse de son enterrement a été célébré.
C’est après une réception officielle à la Mairie de Nova Gorica, puis un repas où il m’avait convié, pour que je découvre les spécialités culinaires locales, que Samo Turel m’a conduit à Kostanjevica où j’ai été accueilli par Mirjam Brecelj qui veille avec les Franciscains à la préservation des lieux avec une gentillesse et un dévouement sans faille.
J’ai apprécié de pouvoir, dans ce contexte officiel, être seul, un moment, pour un temps de recueillement et d’émotion.
Je remercie SAR Guillaume de Luxembourg et son épouse SAR Stéphanie pour la réception de ce soir au Château de Colmar Berg
— Jean-Philippe Carpentier (@JPCarpentierUE) July 11, 2025
En présence de @Carpentier_So pic.twitter.com/wwFb1e0AoZ
RD : Vous avez proposé l’érection d’un monument dans la basilique de Saint-Denis en hommage à Charles X. Quelle forme souhaiteriez-vous donner à ce projet, et comment pourrait-il rapprocher les mémoires française et slovène ?
JPC : La basilique de Saint Denis abrite depuis toujours les rois de France et il me semble normal qu’un cénotaphe rappelle que le dernier de ces rois de France était Charles X.
Je souhaite donc qu’un tel monument puisse être érigé en la basilique Saint Denis, permettant à ceux qui le souhaite de s’y recueillir.
Je pense cependant qu’il faut éviter toute démarche clivante et, au contraire, associer toutes les parties prenantes, slovènes et françaises à ce projet qui permettrait de rappeler sur le cénotaphe le lieu de la dernière demeure de Charles X.
Il s’agit ici de réconcilier les mémoires et permettre une meilleure compréhension de l’histoire et de la vie de Charles X, scellant ainsi une alliance indéfectible entre Saint Denis et ce couvent slovène appelé parfois le « petit Saint Denis » qui pourrait s’inscrire dans le contexte plus large d’un circuit des nécropoles royales sur lequel je travaille.
RD : Depuis plusieurs décennies, des associations et d’autres descendants réclament le retour de Charles X à Saint-Denis, parfois avec vigueur. Vous-même, vous y êtes opposé. Pourquoi défendez-vous le respect de sa sépulture actuelle plutôt qu’un transfert en France ?
JPC : Je me suis, effectivement, clairement exprimé sur mon souhait que Charles X demeure en Slovénie.
Il y est mort, en Chrétien, y a été inhumé selon ses souhaits. Les autres membres de la famille qui reposent à Kostanjevica, comme, par exemple, Madame Royale, ont explicitement exprimé le souhait d’y reposer auprès de leurs proches.
Depuis de nombreuses années, les franciscains veillent et gardent fidèlement la mémoire de Charles X. Sans leurs soins attentifs, il ne resterait surement plus rien de sa sépulture.
Je souhaite donc qu’il repose en paix, dans ce lieu qu’il a choisi, au milieu des siens, dans ce monastère si propice au recueillement où fleurissent les roses Bourbon.
RD : Le débat sur le retour des Bourbons a souvent divisé les milieux royalistes, notamment entre les soutiens du duc d’Anjou et ceux du comte de Paris. Comment percevez-vous ces dissensions, et pensez-vous qu’elles nuisent à la mémoire de Charles X ?
JPC : Comme vous le savez, je suis issu de la branche des rois Bourbons, seule descendante agnatique de Louis XV et de Charles X. Les dissensions entre les Bourbons d’Espagne et les Orléans me sont étrangères.
RD : Vous avez déclaré que “faire connaître en France que Charles X repose ici, c’est rappeler que nos racines dépassent nos frontières”. Que signifie pour vous cette vision européenne de la mémoire, et comment aimeriez-vous qu’elle soit transmise aux générations futures ?
JPC : Lors de mon voyage en Slovénie, j’ai été invité au ministère des Affaires étrangères et au Parlement Slovène.
Dans mes discussions axées autour de la culture et de ma famille, j’ai rappelé quelques liens familiaux avec la Slovénie. J’ai évoqué Arnulf de Carinthie (la Carinthie était une province slovène-ndlr), fils du roi Franc Carloman et de sa concubine Liutswinde qui, après avoir succédé à son père a connu un destin exceptionnel, rappelant que, comme son ancêtre Charlemagne, il avait été couronné par le pape Empereur d’Occident le 22 février 896.
J’ai ensuite rappelé que la Slovène Barbara de Celje, épouse de Sigismond de Luxembourg en 1408, dont je descends de nombreuses fois, était une des grands-mères de l’Europe.
L’histoire personnelle de Charles X l’a conduit à travers l’Europe, vers la Slovénie. L’Europe s’est ainsi faite, bien avant le XXème siècle et nos racines dépassent, de toute évidence, nos frontières. Il est donc logique d’avoir une vision européenne, qui n’exclut pas une vision nationale, de la mémoire. Charles X, pour sa part, était un personnage complexe, dont les réalisations en matière législative ou en matière de politique économique sont souvent méconnues.
C’est précisément cette ouverture à l’histoire qui permettra de construire les générations futures. J’ai l’habitude, toutes les semaines, d’exprimer mes idées, de proposer des solutions aux problèmes de notre monde actuel, en écrivant dans Le Contemporain. Je ne pense pas que l’Histoire soit un éternel recommencement.
Elle nous offre des clés d’analyse nous permettant de comprendre le présent et d’écrire l’avenir, et en ce sens elle guide mes actions et les solutions que je propose.
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Frédéric de Natal
Rédacteur en chef du site revuedynastie.fr. Ancien journaliste du magazine Point de vue–Histoire et bien d’autres magazines, conférencier, Frédéric de Natal est un spécialiste des dynasties et des monarchies dans le monde.