Un État dans l’État à elle toute seule. C’est ainsi que l’on pourrait résumer les activités de la Maison royale de Roumanie qui jouit d’un fort pouvoir de représentation, égal à ceux du Président de la République . Hier, la princesse Margareta, curatrice du trône et présidente de la Croix-Rouge de Roumanie, a rencontré le ministre de la Défense nationale, M. Vasile Dîncu, afin de faire le point sur le conflit russe et la situation humanitaire en Ukraine. Profondément européenne, la fille du roi Michel Ier a dénoncé plus d’une fois l’ingérence russe dans les affaires internes de son pays.

Depuis le déclenchement de la guerre russo-ukrainienne, la Maison royale de Roumanie fait preuve d’une intense activité. Curatrice du trône, la princesse Margareta est aussi la présidente de la Croix-Rouge de Roumanie. Face au conflit russo-ukrainien qui a éclaté aux abords de la Moldavie, ancienne région de la Roumanie devenue indépendante et dont certains de ses compatriotes aimeraient le retour dans le giron national, la fille du roi Michel Ier a décidé de coordonner elle-même l’aide humanitaire qui s’est déployée dans le nord de la Roumanie afin d’aider les 7000 ukrainiens, déjà présents, à traverser le point frontalier de Sighetu Marmatiei. Aux personnes fuyant la guerre, la Croix-Rouge roumaine a fourni près de 20 000 cartes SIM prépayées, offertes par Telekom Romania Mobile, comprenant un certain nombre de minutes gratuites, SMS et Internet illimité aux ukrainiens entrant en Roumanie.

La princesse Margareta reçoit représentants diplomatiques au Palais Elizabeth afin d’évoquer la crise en Ukraine @Dynastie/Daniel Angelescu ©Casa Majestății Sale

La princesse Margareta coordonne personnellement l’action humanitaire

Aide humanitaire mais aussi présence accrue sur le front diplomatique depuis le Palais Elizabeth, la résidence royale, où la princesse Margareta et son époux, le prince Radu, ont reçu plusieurs représentants comme Dan Iancu directeur général du Département des relations avec ses voisins de l’Est ou Loredana Pădurean, conseillère diplomatique en poste à la direction des relations avec la République de Moldavie. Ils ont également discuté avec les représentants du ministère des Affaires étrangères des conséquences générées par cette guerre dans toute la région, des efforts que la Roumanie doit déployer tant au sein de l’OTAN qu’au sein de l’Union européenne, afin d’aider à la résolution de ce conflit qui menace l’intégrité territoriale de son pays et de la Moldavie, république à laquelle la Maison royale est fortement attachée. Hier, la curatrice du trône a été reçue par le ministre de la Défense nationale, Vasile Dîncu, afin de faire un nouveau point sur les actions humanitaires à accentuer en raison de la masse d’exilés fuyant les bombardements russes et s’avançant vers la Roumanie.

La princesse Margareta et le ministre de la Défense de Roumanie @@Dynastie/Daniel Angelescu ©Casa Majestății Sale

Ballet diplomatique au Palais Elizabeth 

Résolument tournée vers l’Europe, lors de son discours annuel au corps diplomatique en 2020, la princesse Margareta avait rappelé que « la transformation de la Roumanie en ce que nous connaissons aujourd’hui n’aurait pas pu se faire sans cette institution, l’OTAN qui assure notre prospérité et notre sécurité ». Allusions à peine voilées à l’ingérence russe qu’elle avait dénoncé un an auparavant dans un discours similaire, accusant le Kremlin de se comporter en puissance hégémonique. « Je me félicite également des contributions de nos alliés à la défense de la Roumanie. Mais je me demande seulement si nous en faisons assez, compte tenu des problèmes auxquels nous sommes confrontés en Ukraine et autour de la mer Noire. Permettez-moi de vous rappeler que toutes les attaques de la Russie sur notre sécurité, de l’invasion en 2008 de la Géorgie à celle de l’Ukraine en 2014 en passant par l’intervention militaire russe au Moyen-Orient en 2015, ont eu lieu dans cette partie du monde » avait alors déclaré la princesse Margareta, visiblement visionnaire. Des propos qui avaient provoqué la colère de l’ambassadeur russe en poste à Bucarest et qui lui avait répondu en ironisant sur « ces phobies historiques et géopolitiques manifestement encore cultivées dans le « Vieux Royaume » ».

Réunion entre le ministre de la Défense de Roumanie et la Maison royale @Dynastie/Daniel Angelescu ©Casa Majestății Sale

La Moldavie, terrain de jeu des russes et des européens sous l’oeil roumain

Abolie illégalement en 1947 par les pro-soviétiques qui ont instauré par la suite un régime dictatorial jusqu’à la chute du mur de Berlin, un demi-siècle plus tard, plus de 30% des roumains souhaitent le retour de la monarchie. Un débat qui agite la classe civile et politique roumaine puisque dernièrement plusieurs voix se sont élevées afin que l’idée puisse être débattue au parlement. Tout comme l’idée de fusion entre l’ancienne Bessarabie et la Roumanie. Berceau de la Roumanie historique, la Moldavie a pris son indépendance en 1991et devenue très rapidement l’objet d’une guerre géostratégique entre russophones et roumanophones qui se sont déchirés militairement lors de la guerre du Dniestr l’année suivante. Aujourd’hui, ce fragile état, qui a connu plusieurs scissions territoriales (comme avec la Transnistrie), est au centre d’un combat politique entre Moscou et Bruxelles qui rivalisent d’ingéniosité pour faire avancer leurs favoris respectifs. Avantage actuellement à l’Union européenne (UE) bien que ce pays n’en soit pas membre ni de l’OTAN. Lors de la dernière élection présidentielle en novembre 2020, la pro-européenne Maia Sandu a remporté la majorité des voix face au dirigeant pro-russe Igor Dodon. 67% des roumains souhaiteraient que la Moldavie soit de nouveau réunie avec la Roumanie selon un sondage daté de 2018.

Frederic de Natal