Elles sont une douzaine en Europe et jouissent d’une bonne popularité. Pour certains, les monarchies sont un gage d’avenir meilleur, de stabilité et d’indépendance politique. Pour d’autres, elles sont les reliques d’un passé révolu, une chimère anachronique aux coûts exorbitants. Chacun avance ses arguments. A la veille des élections présidentielles, la Revue Dynastie revient sur un mythe tenace. Celui du coût faramineux des monarchies.
Par une ironie de l’Histoire, la République française est entourée de royautés. Belgique, Royaume-Uni, Luxembourg, Espagne… continuent de faire rêver des centaines de milliers de français qui suivent avec passion les moindres faits et gestes de ces familles royales. Depuis la chute du Second empire en 1870, la France est une République qui a eu du mal à s’installer dans le paysage, qui demeure encore aujourd’hui contestée. Il existe toujours des mouvements qui tentent de convaincre de la nécessité de restaurer ce type d’institution, la considérant comme un symbole de stabilité et un véritable îlot de démocratie. Mais pour leurs contradicteurs, les monarchies sont avant tout des reliques du passé qui coûtent une fortune aux contribuables des pays concernés .
Des présidents onéreux
En 2017, Emmanuel Macron est entré au Palais de l’Élysée, jadis occupé par la marquise de Pompadour. C’est sous les ors de la monarchie que le premier citoyen de France a décidé de poser ses bagages pour un quinquennat. Chaque année, la Cour des comptes doit publier un rapport qui révèle le détail des moindres dépenses du couple présidentiel dans l’exercice de ses fonctions. Depuis quelques années, l’Élysée est doté d’un budget qui pourrait faire pâlir ses voisins : Environ 100 millions d’euros. Un montant récurrent. A titre de comparaison, si on prend l’année 2013, c’est seulement 60 millions d’Euros qui ont été attribués par le Congrès américain pour la seule utilisation de la Maison-Blanche, 41 millions pour la Chancellerie allemande ou 30 millions d’euros pour le palais de Buckingham. Le budget français est loin de compter certains à-côtés allant du paiement par dizaines de milliers d’euros pour des sondages cousus mains à l’utilisation d’un coiffeur dont le président concerné ne brillait pourtant pas pour sa toison chevelue en 2012. A chaque quinquennat, sa rénovation du Palais de l’Élysée au goût des vainqueurs de l’élection. De Jacques Chirac à Emmanuel Macron, des analystes financiers ont estimé que cela avait couté au contribuable pas moins de quatre dizaines de millions d’euros. Le budget français a d’ailleurs très peu évolué en cinq ans. Selon la Cour des comptes, en 2022, une demande a d’ors et déjà été faite pour un montant de 106 millions euros. Une somme que rien ne justifie puisqu’avec deux ans de pandémie, l’État aurait dû faire des économies. Ainsi et pour seul exemple, prévus à hauteur de 15 millions euros, seuls 7 millions ont été dépensés par le président en voyages officiels. Quid du reste ? Si le président n’est pas doté d’une liste civile comme les souverains, il bénéficie d’un salaire dont le montant annuel a été de 182 000 euros brut l’année dernière.
En 2021, la monarchie belge a coûté moins cher que la république française
A quelques heures de la capitale française, le royaume de Belgique. Souverain depuis 2013, le roi Philippe se voit alloué un montant voté par le Parlement qui chiffre les besoins de la famille royale. Cette année, c’est 12 millions d’euros qui ont été donnés au seul monarque, somme non soumise à l’impôt. « Il s’agit de tous les moyens que la Nation met à disposition du chef de l’État pour lui permettre d’exercer la fonction royale dans tous ses aspects et avec la dignité qui convient » indique le Soir Mag dans son enquête sur le coût des monarchies et des républiques. A l’instar de son voisin français, le montant doit couvrir les dépenses de chauffage, parc automobile, de ménage, visites officielles etc. A noter que la souveraine ne reçoit aucune dotation, à contrario de la Première dame de France qui a disposé cette année d’un budget de 291 000 euros, et où les frais engendrés par son agenda sont autant de sommes qui viennent en déduction du budget alloué à son royal époux. Et si les autres membres de la famille royale reçoivent également des sommes, elles sont toutes soumises aux impôts sur le revenu. Pour le Soir Mag qui a décortiqué les comptes des deux états, le constat est sans appel : « Le système républicain coûte près de 4 fois plus que le système monarchique belge (…) ». Encore faut-il ajouter que pour chaque président qui quitte ses fonctions, l’État français prend en charge les salaires et frais de fonctionnements de ceux-ci jusqu’à leur mort. La seule protection policière de Nicolas Sarkozy (2007-2012) coûte à elle seule 866 000 euros par an aux contribuables et 756 000 euros à François Hollande (2012-2017). La palme de l’indécence revenant au défunt président Valéry Giscard d’Estaing dont les seuls frais de cabinet (pour ne citer que cela) a coûté près de 30 millions d’euros à la France en 39 ans. Un luxe qui est réservé aux dirigeants de la République française, les rois restant sur leur trône et décédant dessus, à quelques exceptions près sans que cela ne vienne modifier les sommes votées pour les listes civiles.
Les dépenses de l’Élysée pointées du doigt
En 2006, le député socialiste de l’Aisne, René Dosière, a pointé du doigt la multiplication par 9 du budget de l’État. Un rapport détaillé que l’on peut retrouver dans un livre intitulé « L’argent caché de l’Elysée », chez Seuil. Face cette gabegie financière, la Cour des Comptes a dénoncé à de nombreuses reprises cette situation mais que rien ne semble endiguer alors « que l’on peut donc légitimement réduire de 25 à 30% le budget » explique René Dosière désormais à la tête de l’Observatoire de l’éthique publique. Ramené au nombre d’habitants par pays, la monarchie britannique coûte toujours moins chère que la république : 2 euros pour Paris contre 50 centimes d’euros de moins pour Londres (budget 2021). Dans leur livre « 10 (très) bonnes raisons de restaurer la monarchie », Renaud Dozoul et Laurent-Louis d’Aumale analysent le mythe persistant du coût des monarchies, citant comme référence Buckingham Palace. « Malgré les apparences, la monarchie anglaise coûte beaucoup moins au Trésor britannique que la Présidence française aux Contribuables Associés. Cinquante-quatre millions d’euros par an pour la couronne contre cent vingt-deux pour l’Élysée : deux fois et demie plus chère ! Ce chiffre intègre les quatre-vingt-deux millions d’Euros du coût net de l’Élysée, et les deux cents millions d’Euros dépensés tous les cinq ans pour les élections présidentielles. Au-delà des frais de la présidence et de ses générosités, on peut méditer sur le poids symbolique de l’État » peut-on lire dans un des passage cet ouvrage publié aux Müller Édition.
« En l’absence du roi, et le président étant voué à changer régulièrement, l’État est le seul outil d’incarnation permanente de la république. C’est par la taille de l’État que celle-ci assure sa fonction symbolique en France. Un État gros et lourd donne une impression de puissance et de pérennité. Or ce poids a un coût. Les pays où la fonction symbolique est assurée par une famille royale peuvent sans doute plus facilement limiter l’État à sa vocation de gestion de la cité, en faisant un outil plus souple et par conséquent plus efficace » affirment Renaud Dozoul et Laurent-Louis d’Aumale. Mais alors, si demain, la France était une Monarchie, combien nous coûterait une institution royale ? Prenons l’hypothèse simple de transposer le dernier budget de la couronne britannique sur celui de la France. La réponse : « Le prix d’une baguette de pain soit 90 centimes d’euros par habitant ».
Frederic de Natal