En 2018, elle a fait la une de « Cato », le magazine de l’institut du même nom, un « think tank » libertarien américain. Connue pour ses tenues outrancières dans les années quatre-vingt, la princesse Gloria von Thurn und Taxis est désormais loin de cette image rock ‘n roll et punk qu’elle a longtemps cultivé dans les médias et dans les boîtes de nuit.  A 61 ans , elle est aujourd’hui rangée de cette vie mondaine, de glam’s et de paillettes. Devenue une véritable activiste catholique, elle reste l’héritière d’un nom prestigieux. A la tête d’une fortune colossale, Gloria von Thurn und Taxis s’est peu à peu transformée en une influenceuse politique courtisée par tous les milieux conservateurs qui se reconnaissent dans ses discours.

Gloria von Thurn und Taxis Official@facebook

La princesse Gloria von Thurn und Taxis est née comtesse Schönburg-Glauchau, au sein d’une maison dont l’histoire se mélange depuis des générations avec celle du royaume de Saxe et  la construction de l’Allemagne. Selon la légende, leurs premières armoiries remonteraient aux temps des Carolingiens. Les nombreuses branches de cette famille ont même donné quelques personnages illustres des deux côtés du Rhin, en Allemagne et en Autriche. Parmi eux, le prince Alois Schönburg-Hartenstein (1858-1944) qui fut un militaire reconnu pour sa force de caractère, un secrétaire d’état autrichien et un opposant notoire au nazisme ou encore le comte Joachim de Schönburg-Glauchau (1929-1998) qui fut exproprié par les soviétiques en 1945, brièvement déporté et qui, pour échapper aux affres de la ruine financière, emmena sa famille vivre dans la corne de l’Afrique durant trois décennies. C’est en 1979, quelques années après être revenue en Allemagne, qu’elle rencontre le prince Johannes Thurn und Taxis, un homme d’affaire à la généalogie éloquente. Entre eux, une complicité teintée d’une folie commune et d’une passion pour les soirées mondaines. Bien que le prince soit de trente ans le cadet de Gloria, le mariage sera hautement médiatisé, à l’image du couple fantasque qu’ils formeront et qui sera couronné par la naissance de trois enfants.

De militante punk à pasionaria conservatrice

En tailleur, la princesse Gloria von Thurn und Taxis a rangé ses costumes extravagants et ses coiffures provocatrices qui faisaient la joie des médias « people » depuis le décès de son mari en décembre 1990. Le réveil a été brutal, les dettes laissées par le prince Johannes sont gigantesques et l’héritage de cette famille illustre est menacé de disparition. Oubliée la « fashionista », elle se mue en gestionnaire financière (son fils Albert pèse 2 milliards de dollars selon le magazine Forbes), redresse la barre du portefeuille familial et change drastiquement les noms de son carnet d’adresse. Le Pape benoît XVI, le premier ministre hongrois Viktor Orban, l’ancien conseiller à la Maison blanche, Steve Bannon, le premier ministre bavarois Markus Söder (qui l’appelle sa « chère princesse »), l’archevêque Gerhard Ludwig Müller (qui selon elle est  « le Donald Trump de l’Église catholique ») ou encore le cardinal Raymond Burke sont ses nouveaux amis. Elle a même été invité au Congrès des familles en 2019, sorte de grande messe qui réunit certains leaders politiques, chefs religieux et princes traditionnalistes. Gloria von Thurn und Taxis assume sa proximité avec l’AfD (Alternative pour l’Allemagne) et ses prises de positions ont fait grincer des dents plus d’une fois. Elle refuse la pilule, se déclare contre l’avortement (« le sexe est là pour faire des enfants. L’avortement est un meurtre » affirmait-elle en 2001), critique publiquement la théorie du genre comme les dispositions sanitaires mises en place contre le covid-19 (elle prétend que ceci est « l’œuvre du diable »), prône le retour des femmes aux foyers, défend un concept traditionnel de vie, se veut anti-migrants et accuse les pratiques sexuelles des africains d’être responsables de la propagation du sida. Ce qui ne l’empêche pas d’avoir acheté une maison au Kenya où elle espère y prendre sa retraite.

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« Le catholicisme, c’est une croyance vivifiante »

C’est sa rencontre avec Monseigneur Michael Schmitz, le vicaire général de l’Institut du Christ Roi Souverain Prêtre (I.C.R.S.P.) et un passage à Lourdes qui a permis un retour de la princesse au sein de la religion catholique. Ici on prône la messe sous la forme tridentine du rite romain. Installée à Rome au début des années 2000, c’est par l’intermédiaire de la princesse Alessandra Borghese, qui organise des concerts liturgiques dans les églises, qu’elle est mise en contact avec celui qui est encore le cardinal Ratzinger. Entre cette ancienne fêtarde et le prélat, un coup de foudre spirituel. Devenu Pape, une des premières messes en plein air que Benoît XVI célébrera aura lieu à Ratisbonne en septembre 2005, près du château de sa famille.  Au premier rang des invités, la princesse pop-star qui évoque Jean-Paul II comme modèle. « Après l’avoir entendu prêcher, j’ai vite compris que ce type était un saint » se remémore-t-elle . Elle rêve d’ailleurs de « mettre en place un salon qui permettrait de recréer les relations entre la hiérarchie vaticane et l’ancienne aristocratie romaine » confie la princesse au magazine Vanity Fair, paire de lunettes géantes aux verres roses vissée sur le nez. « Le catholicisme, c’est une croyance vivifiante » renchérit la princesse

Et quand elle ne milite pas en faveur du catholicisme ou qu’elle ne sert pas des repas à des centaines de sans-abris, elle collectionne, peint, expose et fait du mécénat. Une philanthrope aux multiples facettes qui ne laisse personne indifférent et incarne encore l’esprit de liberté politique propre aux von Thurn und Taxis.

Frederic de Natal