C’est le dernier chapitre d’une querelle de palais qui agite la monarchie jordanienne depuis avril 2021. Accusé d’avoir orchestré une tentative de coup d’État contre son demi-frère le roi Abdallah II, le prince Hamzah avait été placé en résidence surveillée avant de faire amende honorable. Hier, dans un communiqué publié sur les réseaux sociaux, il a annoncé qu’il renonçait à ses titres afin de protester contre la politique menée par le monarque Hachémite.
C’est sur son compte Twitter que le prince Hamzah a annoncé qu’il renonçait à son titre de prince royal qu’il détenait depuis sa naissance. Ancien héritier au trône de 1999 à 2004, il avait été destitué au profit de son neveu, le prince Hussein, fils du roi Abdallah II. Une décision dont il ne s’était jamais remis. « Après ce que j’ai vécu et vu ces dernières années, j’en ai conclu que mes convictions personnelles et les valeurs que mon père m’a inculquées, et auxquelles j’ai tâché dans ma vie d’adhérer, ne sont pas en phase avec les approches, les tendances et les méthodes modernes de notre institution » a déclaré le prince. « Donc, du point de vue de la fidélité à Dieu et à ma conscience, je ne vois pas d’autre choix que d’abandonner et de renoncer au titre de prince » a poursuivi Hamzah de Jordanie.
Les querelles de palais persistent
Un communiqué qui a surpris les Jordaniens. Il y a quatre semaines encore, le prince Hamzah, 42 ans, avait présenté ses excuses officielles au monarque Hachémite dans une lettre rendue publique où il affirmait avoir « traversé une épreuve difficile, surmontée grâce à la sagesse, la tolérance et la patience de Sa Majesté », appelant son demi-frère à « tourner la page » d’un épisode qui avait secoué la monarchie en avril 2021. Le gouvernement avait déjoué une tentative de coup d’État et pointé du doigt la participation du prince royal. Niant dans une vidéo les accusations portées contre lui, Hamzah avait été assigné à résidence avant d’être pardonné par le roi Abdallah II. S’il s’est abstenu dans son communiqué de critiquer directement le souverain et les élites dirigeantes, comme il l’avait fait dans le passé, son ton ne laisse pas de place aux doutes. Les querelles de palais persistent.
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Tensions politiques au sein de la monarchie Hachémite
« Je resterai comme j’ai toujours été et aussi longtemps que je vivrai, fidèle à notre bien-aimé Jordanie » a déclaré le prince Hamzah, père de 6 enfants. Il n’est pas certain que cette renonciation lui permette de retrouver sa liberté de mouvement. L’ancien prince héritier semble reprocher au roi Abdallah, le vote de la dernière réforme constitutionnelle, fortement critiquée par une partie du parlement, qui a renforcé les pouvoirs du monarque. Désormais le roi peut nommer lui-même les hauts responsables de la sécurité publique et de la justice, le grand mufti et les conseillers royaux. Officiellement, il s’agit de répondre aux demandes des jordaniens qui ont exigé une réforme de cette monarchie épargnée par le Printemps arabe de 2011. Pourtant, il est toujours interdit pour la presse locale d’évoquer le conflit familial. Selon l’expert en géopolitique, le professeur Amer Sabaileh, interrogé par le quotidien Bloomberg, « Hamzah renoue avec son amertume. Nous sommes revenus au point zéro et il n’y a clairement pas eu de réconciliation ».
La Cour royale n’a fait aucun commentaire immédiat. Monté sur le trône de Jordanie en 1999, le roi Abdallah II est un allié de l’Europe et des États-Unis dans la lutte contre les islamistes qui opèrent encore au Moyen-Orient et un médiateur incontournable de la crise en Israël. Depuis plusieurs mois, la monarchie jordanienne est frappée par une crise économique et l’objet d’une contestation de la part de certaines tribus bédouines qui reprochent à la dynastie Hachémite d’avoir adopté un style trop occidental.
Frederic de Natal